Un moment donné, ça va faire

Il faut réapprendre à rire de soi. L’autodérision est un baume pour bien des maux.

Je ne pensais pas parler du même sujet deux semaines de suite, mais il y a encore de l’encre qui coule à propos du Gala Les Olivier et du cri des humoristes en faveur de la liberté d’expression. C’est probablement une perte de temps, mais je vais quand même essayer de répondre aux trolls des réseaux sociaux, ainsi qu’à certains de mes collègues.

Évidemment, on doit commencer par réaliser que l’on ne sera jamais tous d’accord, et c’est tant mieux. Je suis toujours partant pour un bon débat. On a eu la chance d’entendre plusieurs opinions et arguments sensés qui portent à réflexion. Mais il y a aussi plusieurs crinqués qui s’en sont donné à cœur joie pour exprimer leur opinion de façon «néandertale», nous donnant même une idée de comment ça se passait à Berlin en 1936. C’est toujours difficile de réfléchir à travers le vacarme des épais qui gueulent.

Pas persécutés

La première chose que je veux mettre au clair, c’est qu’on est loin d’essayer de jouer aux persécutés. Il y a une différence entre chialer pour avoir le droit de dire ce que l’on veut dire et se présenter en victime. Guy Nantel et Mike Ward ne se sont jamais dits victimes de censure. Ils ont simplement souligné le fait qu’ils ont été censurés, point. Encore une fois, nuance.

Même chose pour ceux qui essayent de dire qu’on joue les offusqués lorsqu’on nous critique. Faux encore. Les humoristes, on sait tous que, la première fois qu’on est monté sur une scène, c’était le début d’une existence où la critique fait partie du quotidien. Si ce ne sont pas les journalistes, ce sont les gens dans la salle ou sur notre page Facebook. Même la famille s’en mêle, car maman a toujours quelque chose à dire sur ce que tu portes quand tu passes à la télé.

Ce que l’on veut, c’est pouvoir exprimer ce que l’on trouve drôle et, justement, vous laisser le plaisir de nous critiquer. Ce que l’on déplore le plus présentement, c’est que peu importe ce que l’on dit, il y a quelqu’un qui va trouver des pseudo-victimes. Impossible de rire de quoi que ce soit sans que quelqu’un ou un groupe se sente visé ou persécuté.

Le pire, c’est que tout cela provient d’une faible minorité de gens qui chialent sur tout de toute façon, des gens qui aiment mieux rester devant leur ordinateur à vociférer contre la société plutôt que de travailler à la rendre meilleure.

On consent beaucoup trop de pouvoir décisionnel à cette minorité de gens. Je l’ai déjà dit et je le répète: il faut réapprendre à rire de soi. L’autodérision est un baume pour bien des maux. Je vous suggère d’essayer de l’appliquer.

Droit de le dire

Une expression dit que le pire ennemi du roi n’est pas le roi d’en face, mais le fou qui est dans sa cour. Est-ce que les humoristes vont trop loin? Bien sûr que oui, ça nous arrive. C’est comme ça que l’on redéfinit nos limites et que l’on agrandit notre zone de confort.

Même entre nous, on n’est pas toujours d’accord avec ce qui est dit, mais nous sommes unanimes sur une chose: c’est qu’on a le droit de le dire quand même. La journée où tout le monde va être d’accord avec ce qui se fait en humour à la télévision et sur scène, ce sera le jour où la société arrêtera de réfléchir et de débattre. Et ça, ce n’est bon pour personne.

Pour l’instant, soyons d’accord sur le fait de ne pas être d’accord. Je sais qu’il y a encore place à de bons arguments dans ce débat. Mais des fois, la meilleure chose à faire, chers collègues, reste celle-ci: ferme-la, décroche et passe à autre chose.